Programme Mai 2012
Vous aussi, jetez un oeil par le trou de la serrure pour découvrir le programme du mois de mai des Montreurs !
L'Avis des Montreurs
Eva de Kike Maillo (Espagne)
Ce qui frappe de prime abord dans Eva, c’est ce minimalisme assumé, cette façon de traiter, à échelle d’homme, une intrigue futuriste, quitte à en dissoudre toute la substance dans une trame dramaturgique classique mais néanmoins efficace, reposant par ailleurs sur une révélation finale bien amenée.
Car finalement, ce qui intéresse le réalisateur, ce n’est pas tant l’intelligence artificielle et la volonté démiurgique qu’à l’humain de vouloir en maîtriser jusqu’à sa moindre émotion que les hommes eux-mêmes et leurs émotions primaires. En ce sens, EVA s’affranchit de toutes similitudes avec une œuvre dont l’ombre pourrait être pesante : A.I. ( Spielberg / Kubrick )
Une belle scène cristallise ceci : Dans une soirée et sur un air de David Bowie, la caméra, de plus en plus distante alors que le refrain de « Space Oddity » se fait entendre, ( résonnant alors avec les doutes intérieurs du personnage principal ), devient le témoin d’un flots d’émotions distinctes et variées, véhiculées spontanément par les personnages au sein du « triangle amoureux » qu'ils constituent.
Cette scène en dit long sur le côté primitif et incontrôlable de nos émotions, et sur l’arrogance de l’être humain à vouloir créer quelque chose qu'il est incapable de maîtriser lui-même.
La thématique du film se marie par ailleurs avec adresse aux partis pris formels, reposant sur un contraste entre une caractérisation futuriste réussie ( animaux en image de synthèse, logiciel de création de l’androïde…) et un environnement crédible et réaliste (il pourrait s’agir de notre époque), créant alors une sorte d’hybridation visuelle habilement retranscrite.
En somme, Eva est une première œuvre singulière et réussie, une agréable surprise dans un genre habituellement gangrené par sa propension édifiante à la surenchère visuelle, attitude qui peine souvent à masquer l’absence cruelle d’enjeux narratifs et émotionnels indispensables pourtant à ce genre de film.
(Axel Frechet)